Lors d’un entretien en 2019, dans un fonds d’investissement au Luxembourg lorsque j’ai évoqué l’idée d’organiser un atelier sur l’éthique qui ne porterait pas sur les produits financiers, j’ai vu la surprise de mes interlocuteurs de la direction qui se demandaient ce que pourrait être le contenu de cet atelier.
J’utilise l’angle mort comme image pour démontrer à quel point l’éthique impérative se trouve dans la zone inaccessible au champ de vision de la finance. Comment se fait-il que nous soyons arrivés à parler d’éthique impérative en finance ? Nous sommes face à une activité économique créée dans le but de fructifier le capital et de faire du profit. Cette expression « éthique impérative » vient des impératifs catégoriques de certains philosophes que je vais développer dans cet article. Le mot impératif paraissant un ordre, risque de faire grincer des dents, seulement il est nécessaire parfois qu’une autorité donne des ordres et surtout en finance cela fait partie du vocabulaire. Quels sont les ordres que donne l’éthique ?
Pour commencer nous allons nous pencher dans un paragraphe sur l’essence même de l’éthique. Ethos, du grec, signifie l’habitat1)Roger -Pol Droit, L’éthique expliquée à tout le monde, éditions Seuil, 2009, par exemple la manière pour une espèce animale d’habiter le monde. L’éthos des oiseaux ? voler, chanter, pondre des œufs…l’éthologie serait formée sur le même mot pour étudier les comportements des animaux dans leur milieu naturel. Ethos c’est ce qui est relatif aux mœurs, bonnes ou mauvaises. Ethos peut vouloir dire aussi caractère d’une personne. C’est la façon dont vivent les hommes, les coutumes qu’ils observent, les règles, leurs lois. L’éthique vient aussi du latin ethikè ethikes theoria, contemplation comportementale pour désigner un savoir relatif à la façon de se comporter ou encore les mœurs et l’âme2)Jean Francois Daigne, Ethique financière, que sais-je, 1991. L’éthique répond à la question : comment dois-je faire ? Que dois-je faire ?
Par impératif, il est important de considérer ce qui s’impose avec un caractère et traitement d’urgence et de nécessité en raison de la situation de crise aujourd’hui. La finance est comparée au conducteur d’un véhicule qui a besoin d’exercer un mouvement volontaire de la tête pour contrôler de façon rapide et efficace son angle mort avant de prendre la décision d’effectuer une manœuvre.
La finance, cette activité de profit apparaissait ainsi comme technique et amorale. Jean Michel Poughon (2013)3)Chantal Cutajar, Jérôme Lassere Capdeville, Michel Storck, Finance et éthique, éditions Lamy, 2013 professeur de droit à l’université de Strasbourg ayant rédigé l’introduction du livre « éthique et finance » a affirmé que de prime abord éthique et finance avaient été considérés comme antinomiques. Jean Francois Mattéi (1941-2014 )4) Jean Francois Mattéi, Ethique et Economie, éditions Manucias, 2013 ancien ministre de la santé avait écrit « éthique et économie » et disait qu’un système économique dès lors qu’il régit les échanges entre les hommes n’est ni moral ni immoral . En effet, qu’est-ce qu’il y a de moral dans les activités de souscription de fonds par exemple ? La finance donc travaille aussi sous des ordres donnés par des chiffres. Elle est efficace ou non, correcte ou non et l’efficacité ne relève pas de la morale. On reçoit des ordres, on exécute, on n’a rien à dire. Rien de moral dans les mathématiques, l’addition, la soustraction ou la multiplication des chiffres.
Les nécessités des échanges économiques sont indifférentes par nature aux normes de la moralité. L’économie relève de la contrainte (sans avoir le choix de l’action, imposée de l’extérieur) là où la morale relève de l’obligation (qui dépend de la volonté de la personne). Pour Jean François Mattéi, le délit de corruption par exemple n’est pas proprement économique mais fondamentalement juridique, du fait de la violation de la loi ou moral du fait du non-respect du devoir. La morale intervient dans l’usage bon ou mauvais que l’on fait de la finance. Si c’est ainsi la finance et l’éthos de la finance alors ? Comment expliquer qu’aujourd’hui nous parlions sans arrêt de finance éthique ? de finance verte, de finance solidaire et durable ?
La fabrique de l’éthos de la finance comme elle se présente : la finance éthique
A l’origine, les problématiques éthiques ne faisaient donc pas partie du champ de vision de la finance. Dans les sociétés occidentales, nous avons assisté à des scandales financiers, la corruption, fonctionnement avec l’argent du crime (terrorisme, proxénétisme…), fraude et les dérives managériales. Nous pouvons y ajouter des problèmes sociétaux de dégradation de l’environnement et de préoccupation de la santé nés du financement de toutes sortes de projets sans préoccupations de leur impact sur l’homme. C’est alors que la société civile a pris conscience des excès de la finance, des inégalités économiques et sociales et des problèmes nuisant à l’homme et s’est mobilisée de différentes façons pour exiger des politiques une législation pour davantage de régulation dans la finance. Cette demande de régulation externe a conduit à un changement de comportement dans les entreprises. Toutes ces conduites ont pu être matérialisées par écrit dans des chartes éthiques et des codes de conduite dans les entreprises.
D’un côté, la finance éthique est ainsi née pour plaider et communiquer pour des investissements éthiques, durables pour l’écologie, la finance verte, la finance solidaire, la responsabilité sociale de l’entreprise et des investissements socialement responsables. La compliance est née pour étudier à la loupe la conformité de l’origine des fonds et le bénéficiaire des fonds. De l’autre côté, ce changement de comportement vers l’extérieur n’a pas forcément entraîné la même chose vis-à-vis des actionnaires qui continuaient à régner en toute puissance sur les entreprises et à toucher des dividendes très intéressants et prodigieux. Les dirigeants continuaient à toucher des salaires très élevés, des primes, des parachutes dorés et les bonus distribués aux professionnels ayant atteint leurs objectifs dans le développement de l’établissement.
Ainsi, la réponse de la finance au développement d’un comportement éthique et responsable a été de se rapprocher de l’éthique dans un premier temps par des solutions de solidarité c’est-à-dire, la finance éthique. Puis dans un second temps à travers des solutions techniques qui sont la compliance ou la conformité pour se protéger de ce qui arriverait de l’extérieur par le blanchiment d’argent. Et enfin en interne la charte éthique et toute la lutte contre la corruption, la fraude et l’implantation de comportements se voulant être responsables, loyaux, intègres. Prenons l’exemple du code de déontologie de l’association des banques du Luxembourg, il est écrit dans son introduction : « Les professionnels agissent avec loyauté, équité et intégrité dans leurs relations avec la clientèle, les autres professionnels du secteur financier, les marchés et les relations avec la Société.». Puis dans la rubrique 1.4. Les relations avec la Société : Les professionnels s’efforcent d’adopter un comportement socialement responsable.1.4.1. Ils veillent à intégrer dans leurs politiques des préoccupations sociales, environnementales et éthiques et adoptent une politique humaine et responsable, tant en interne que dans le choix de leurs partenaires et prestataires externes. Cette charte éthique nous dit que les valeurs suivantes : la loyauté, l’intégrité, l’équité devraient habiter la finance. Pourquoi et comment être loyal ?
Nous avions dit que par ses philosophes l’éthique aussi donne des ordres autant que la finance. Des philosophes du moyen âge aux philosophes contemporains, l’impératif catégorique de Kant semble être le fil rouge de la pensée éthique que nous avons jugé correspondre à la finance. Les impératifs catégoriques sont :
c’est-à-dire que tu puisses en même temps vouloir que tout le monde partage la même maxime que toi. L’impératif “Tu ne tueras pas ton prochain” est une telle maxime, mais pas “Tu tueras ton prochain”. En effet, je peux vouloir tuer, mais je ne peux pas vouloir en même temps que tout le monde tue tout le monde. Emmanuel Kant (1724-1804)
1- L’éthique impérative donne radicalement un sens aux chartes éthiques et réciproquement.
Nous nous servons des impératifs catégoriques de Kant et de la théorie de Hans Jonas pour expliquer qu’ils donnent sens à la charte éthique (dans l’application des valeurs de l’entreprise). Par exemple, je suis loyal vis-à-vis de mon employeur. Le terme “Loyauté” renferme le mot “légal” (de lex – legis, loi en latin) faisant référence à un caractère qui s’impose et ne se négocie pas, tel que la loi incarne un caractère contraignant. Conformément à la loi définie par le supérieur qui donne ou dicte ses principes. En hébreux, le mot loyauté est apparenté au mot “amen” qui veut dire : “ainsi soit-il !”, qui est l’expression-clé déclarée par celui qui souscrit aux principes d’un supérieur. On parle de loyauté, car il y a un supérieur et un inférieur. La notion de la loyauté fait plus référence au respect d’un contrat, d’un contrat d’adhésion. Et n’oublions pas qu’un contrat a une force de loi et une loi est contraignante. Il n’est pas aisé d’être et de rester loyal. Pourquoi être loyal ? Selon l’impératif de Kant le professionnel est appelé à être loyal car son comportement devrait être un choix universel qui s’applique à tous sinon il n’est pas éthique ni loyal. Si chacun décide de ne pas respecter les termes de son contrat dans une entreprise, ce serait la catastrophe. Par ailleurs on est appelé à la loyauté par ce que les supérieurs ne représentent pas uniquement un moyen pour satisfaire mes intérêts et que la finalité de mes actions est pour le bien de l’autre dans l’entreprise. Les chartes éthiques sont appelées à être respectées afin que soit respecté l’humain. Autrement dit, je suis appelé à la loyauté envers l’autre. Par conséquent, le sens de la charte éthique pour le professionnel de la finance est de lui permettre de voir dans ses relations avec la clientèle, les autres professionnels du secteur financier, les marchés et les relations avec la Société une fin et non simplement un moyen pour « faire monter ses chiffres », obtenir des bonus et des primes. Ce qui donne un sens aux chartes éthiques c’est de savoir qu’il est important de respecter ces outils dans l’entreprise en agissant comme si notre action de loyauté, d’intégrité, d’équité devait être érigée par notre volonté en loi universelle. Que nous appliquions ou pas les principes nous faisons un choix. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, dans nos actions nous n’agissons jamais seulement pour notre compte. Nous décidons aussi indirectement pour les autres pour tout le monde. Jean Paul Sartre (1905-1980) disait que dans nos décisions, en réalité, nous posons un choix pour l’homme, à la limite pour l’humanité toute entière. Les choix que nous faisons, notre agir engage les autres. L’éthique impérative c’est la règle de l’agir qui nous dit pourquoi nous devons appliquer la charte éthique. Être loyal et intègre (honnête, pas corrompu) dans une entreprise implique de ne pas utiliser ceux qui dépendent de nos ordres comme des moyens mais de les voir comme la finalité de la bonne action, agir pour leur bien et non pour les utiliser comme instrument. Les considérer comme une fin c’est les faire exister, leur donner la parole dans les prises de décisions. Que ces décisions dans le management par exemple se prennent dans les deux sens, aussi bien, du haut vers le bas, top-down, que du bas vers le haut c’est-à-dire bottom-up. Cela commence par la construction de la charte éthique dans les deux sens.
2-l’éthique impérative guide dans l’application concrète du code de déontologie (code de la pratique professionnelle).
Les impératifs de Kant permettent de déterminer les conditions pour appliquer le code de déontologie. Il s’agit d’effectuer un travail avec une bonne volonté, une volonté pure et par devoir et non conformément au devoir.
la bonne volonté : la pureté des intentions. Kant part du concept de “bonne volonté”. L’intelligence, le courage, les compétences, les qualités désirables etc… ne sont pas des choses absolument bonnes à elles toutes seules. Elles ne sont bonnes que lorsqu’elles trouvent leur impulsion dans la bonne volonté, c’est-à-dire la volonté première et originelle de faire le bien pour le bien, la pureté d’intention. Si tel n’est pas le cas, l’intelligence, la compétence etc.…peuvent être des dispositions tout à fait destructrices pour qui souhaite mener une mauvaise action. La valeur de la compétence dépend de l’usage qu’on en fait. Comment le professionnel de la finance utilise-t-il son intelligence et ses compétences. Il en est de même du bonheur : il n’est pas un bien en soi, une fin en soi, puisqu’il peut être source de corruption et de cupidité. Pour obtenir ce que quelqu’un pense qu’il fera son bonheur il est prêt à voler par exemple. Kant dit que tout dépend de la bonne volonté. Qu’est-ce qu’une bonne volonté ? Ce n’est pas une volonté qui atteint ses objectifs, c’est unevolonté dont les intentions sont pures. Qu’est-ce qu’une volonté pure ? Une volonté qui obéit au concept du devoir. Ainsi, la bonne volonté c’est agir par devoir. Qu’est-ce qu’agir par devoir ?
Kant distingue « agir conformément au devoir » et « agir par devoir ». Ainsi, le conseiller financier agit conformément au devoir vis-à-vis de ses clients quand ses motivations sont celles de l’intérêt selon son contrat de travail, pour la bonne réputation de son entreprise et non par devoir moral. Ce type d’action se range dans celui de la légalité, et non de la moralité. La moralité désigne une action faite en voulant accomplir son devoir : « Une action accomplie par devoir tire sa valeur morale non pas du but qui doit être atteint (les objectifs) par elle, mais de la maxime d’après laquelle elle est décidée ». Ce qui est un devoir moral, c’est ce qui obéit à la règle de l’universalité et non aux intérêts et caprices. Ainsi, agir par devoir, pour le conseiller financier reviendrait à agir sans y être poussé, en dehors de toute contrainte qui pèserait sur notre volonté, en toute autonomie par pure obéissance à un ordre de la raison que l’on se donne soi-même. Or agir en toute autonomie c’est agir librement. Donc agir par devoir c’est agir librement. Il est important de noter que le professionnel de la finance en plus d’exécuter les règles de la compliance, finance verte etc… est doté de morale et de ses valeurs de faire le bien et d’être bien. Nous avions pensé que travailler dans la finance ne revient qu’à appliquer la technique et tenir le langage de l’établissement. En se souciant de la réputation de l’entreprise il est important de savoir que c’est avant tout du professionnel de la finance dont il s’agit. Ce professionnel possède des valeurs et des compétences. Ainsi l’éthique est le mode d’emploi de la finance pour passer du savoir-faire et de la connaissance aux valeurs et savoir être du professionnel. Baruch Spinoza (1632-1677) disait que l’éthique vise la vie bonne. Il ne s’agit pas seulement de « faire le bien », il s’agit aussi « d’être bien », soi-même. L’éthique impérative c’est l’agir pas seulement selon les lois et les règlementations mais aussi selon ce qui habite notre âme., c’est-à-dire le bien, donc l’éthique. Et certains professionnels de la Banque en prenant l’exemple de Josette Amor de Finansol (2017)5)Pierre Rabhi &Juliette Duquesne, les excès de la finance, ou l’art de la prédation légalisée, j’ai lu, 2017 ont évoqué cette double personnalité que le travail en finance peut provoquer. Le décalage entre le savoir-faire technique et le savoir être et les valeurs humaines et morales du professionnel. Ainsi l’éthique technique de la finance cherche à donner une bonne réputation, une bonne gouvernance et une politique marketing exemplaire à l’entreprise pour attirer les investisseurs, mais avant l’entreprise il s’agit de la personne individuellement et donc du professionnel auquel s’adresse l’éthique impérative. Le professionnel est élément constitutif de l’institution. Le professionnel est exposé au risque conformité, au risque éthique et à l’abîme de son âme selon la définition de l’éthique comme « âme ». Le rendement du professionnel dépend aussi bien de ses compétences que de son âme.
3-Ethique impérative impose l’Homme dans la finance,
Pour Kant, l’homme est considéré comme l’auteur de la morale. Entre d’une part, les bonus des directeurs et alléchants dividendes envoyés aux actionnaires et d’autre part la suppression massive de postes de salariés et des familles livrées aux difficultés que faisons-nous de l’humanité ? le souci de l’autre ?. L’éthique impérative s’impose dans l’ouragan de l’enrichissement sans fin comme éthique questionnant sur l’Homme (avec grand H) et de la morale. Nous pensons que la finance pour se développer a besoin de l’Homme et de l’autre. Tant qu’elle fait appel à l’homme (auteur de la morale selon Kant) elle est obligée de tenir compte de l’Homme en humanité. Qui est l’autre Homme en face de moi avec qui je vais travailler, établir un contrat, traiter, négocier. Comment suis-je appelé à le traiter ? Hans Jonas (1903-1993)6)Hans Jonas, le principe Responsabilité, Une éthique pour la civilisation technologique, Champ Essais, 1979 était vraiment tourné vers les générations futures. Cette vision comme celle de Kant sur les impératifs catégoriques rejoint la théorie d’Emmanuel Levinas (1906-1995) qui a insisté sur le souci de l’autre. Cette responsabilité de Hans pourrait se rapprocher de la responsabilité institutionnelle de Paul Ricoeur (1913-2005) dont la visée éthique met l’accent aussi sur l’autre et les institutions : une vie bonne, avec et pour autrui dans des institutions justes. Par conséquent nous pouvons comprendre que la visée éthique d’une institution financière est d’être une vie bonne avec et pour autrui. Que la finance soit juste, bonne avec et pour autrui. La préoccupation des sciences sociales : que la finance au 21ème siècle développe l’homme ou bien développe la finance (financiarisation) au service de l’Homme7)André Lacroix et Allison Marchildon, Quelle éthique pour la finance ?, Presse de l’Université du Québec, 2013. Le comportement éthique et responsable est celui de l’impératif humain, la responsabilité par rapport au traitement de l’être humain, l’homme considéré dans toute sa dimension et sa richesse. Pour Kant enfin, L’homme est caractérisé par une “insociable sociabilité” qui fait qu’il ne peut vivre sans ses semblables, mais qu’il a toujours tendance à abuser de sa liberté vis-à-vis d’eux. Il faut donc un maître, que nous pourrions désigner par l’éthique pour le contraindre à réaliser son potentiel moral et à sortir de l’animalité pour devenir une personne.
4- Impératif de responsabilité de Hans Jonas
Hans Jonas développe dans son essai le principe de responsabilité pour la civilisation technologique et numérique. Ce principe repose sur la valorisation de l’existence. C’est-à-dire que l’être est préférable au néant, en vertu de quoi il est nécessaire que l’humanité soit et qu’elle perdure, plutôt qu’elle disparaisse. Ainsi la thèse de Hans Jonas est que nous avons des devoirs envers les générations futures et que ce qui est un bien pour nous-même n’est pas nécessairement un bien pour autrui. La nouvelle responsabilité dont il parle est non réciproque. Elle m’oblige à l’égard d’un avenir qui n’existe pas et auquel je ne demanderais pas des comptes. Ainsi j’ai des devoirs envers les générations futures alors même qu’elles n’ont aucun devoir vis-à-vis de moi.Hans Jonas construit son principe de responsabilité en complément de celui de Kant. L’impératif moral chez Kant était le suivant : « Agis de telle sorte que la maxime de ton action puisse être universalisable ».
La finance a besoin aujourd’hui de l’éthique impérative. La finance est construite sur le risque, elle a conduit à de grandes inégalités économiques et sociales, elle est le champ de nombreuses innovations sans cesse grandissantes. Les marchés financiers peuvent être des mirages, conduire à des projets sans responsabilité. La finance a besoin de l’éthique impérative pour fixer des limites et un cadre à l’enrichissement sur les marchés, rappeler les origines humaines, impulser un souci des autres et du partage des richesses, la question de l’altérité. L’éthique en finance dans l’angle mort de la finance c’est toutes ces valeurs humaines, morales enseignées par la pensée sociale et qui posent des questions dont on ne parle pas ou plus en finance ou dont on reparle de plus en plus (en dehors des investissements dans les produits financiers) qui constitue l’angle mort car on ne les voit pas mais elles existent et comme un angle mort elles peuvent éviter un accident de parcours, un crash, la mort de la finance si elle n’en tient pas compte pour aller de l’avant, passer à une vitesse supérieure. L’éthique impérative c’est la finance rattrapée par l’Homme.
Donc l’Homme qui n’est pas un moyen mais une visée, une fin et l’Homme qui se soucie de l’autre, et l’Homme qui pense à l’universel. Et sans l’Homme la finance ne peut pas aller plus loin. Pour Kant l’homme est considéré comme l’auteur de la morale. La financiarisation est faite pour le profit. Seulement tant qu’elle est exercée par les hommes en contact avec d’autres hommes, tant que nous nous considérons comme des êtres humains, oui nous pouvons faire le bien en finance pour nous-même, pour les autres, pour la cité, dans les instituions justes et nous ne ferons que nous réaliser en tant qu’être humain et donc nous ne ferons que nous réaliser nous-même et faire notre bonheur.
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↑1 | Roger -Pol Droit, L’éthique expliquée à tout le monde, éditions Seuil, 2009 |
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↑2 | Jean Francois Daigne, Ethique financière, que sais-je, 1991 |
↑3 | Chantal Cutajar, Jérôme Lassere Capdeville, Michel Storck, Finance et éthique, éditions Lamy, 2013 |
↑4 | Jean Francois Mattéi, Ethique et Economie, éditions Manucias, 2013 |
↑5 | Pierre Rabhi &Juliette Duquesne, les excès de la finance, ou l’art de la prédation légalisée, j’ai lu, 2017 |
↑6 | Hans Jonas, le principe Responsabilité, Une éthique pour la civilisation technologique, Champ Essais, 1979 |
↑7 | André Lacroix et Allison Marchildon, Quelle éthique pour la finance ?, Presse de l’Université du Québec, 2013 |
↑8 | Représentation de l’environnement de la finance et de ses différentes interactions dont la place de l’éthique impérative et de la morale |
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